329 Dimanche

Précédemment

Sauter le pas

Vous prenez une décision toute seule comme une grande, ensuite il faut en faire part à votre entourage et vous expliquer.
Parfois ce n’est pas gagné.
Les plus proches approuvent la démarche. Ils disent que la maison familiale est là où je suis, que les lieux ne sont pas plus que des objets (ce sont mes plus proches, nous sommes un peu du même esprit). Je crois voir aussi une lueur d’amusement dans leurs regards, ma famille est joueuse.
Moins facile avec le reste de la tribu qui ne comprend pas que je quitte ce paradis. Je comprends qu’ils ne comprennent pas, au fond mon seul argument est ma certitude intérieure. C’est mon histoire.
On ne ferait pas grand-chose si l’on s’en tenait à la vie et l’avis des autres.
Bien sûr que c’est difficile de quitter le lieu des enfances, un endroit magnifique, toute une vie.
Je ne peux pas emporter l’âme de la maison et de ses alentours, mais j’ai la mienne – pleine de ce que j’y ai vécu. A la fois inquiète et ravie de la façon dont tout cela tourne.

Puisque la décision a été prise, je m’interdis de faiblir, et même la paperasse ne m’en dissuadera pas. Je m’en faisais une montagne, ce n’est en fait pas grand-chose. Je boucle tout sans aide.
Et surtout pas celle du notaire.
Au départ je le trouve drôle, un notaire excentrique ça ne court pas les offices. Ensuite je réalise son incompétence, il ne me dit pas qu’il faut pour vendre une maison une attestation de conformité, un rapport énergétique, un diagnostic de la fosse sceptique…
Je change de notaire et lui écris un mail très bien tourné où je lui suggère de changer de métier. Au final, je ne l’envoie pas. Ce mail ne passe pas les trois tamis de Socrate. Pour le premier, ça va, c’est vrai, je l’ai vérifié moi-même, ce type est nul comme notaire. Pour le deuxième tamis, c’est raté, mon mail n’est pas bienveillant, pas mieux pour le troisième : il n’y a au fond aucune utilité à le lui dire, il doit le savoir.
Je crois qu’il me fait perdre du temps, j’ignore que je la vendrai avant même de la mettre en vente.

L’univers semble tout à fait d’accord avec ma décision, il me suffit d’en parler autour de moi, deux amis de la famille se montrent intéressés.
Une maison isolée, en pleine pampa, cependant mitoyenne : le dernier mot revient naturellement aux mitoyens (le Viking et sa Chérie pour ceux qui suivent depuis longtemps), ils vont devoir vivre tous ensemble.
C’est ainsi que je la vends à un beau couple de Marseillais à qui elle va comme un gant.
Je le souhaite à tout le monde, une maison que l’amour a construite.
Elle est entre de bonnes mains, tout est en ordre, la page est tournée.
Reste à savoir où aller.

A suivre (ou pas)