Les ruines de la future maison
Le livre
Il fallait raconter cette histoire de la vraie vie, alors j’ai partagé mon album photo.
Canard enchainé 20/08/2008
D'autres lecteurs
« Les Ruines de la future maison« , c’est cent-dix-huit pages de douceur et de tendresse. Une portion de vie, racontée sans nostalgie, sans regrets mais surtout sans vouloir donner de leçons ni porter de jugement. Une portion de vie qui demande seulement à être lue, partagée et surtout pas jugée, elle non plus.
Cette portion de vie a pour décor « Le Campement ». Un lieu qui porte bien son nom : c’est un champ où l’on habite dans des caravanes, au départ, puis dans une maison en planches, agrandie au fil des ans. C’est un lieu placé sous la protection d’un arbre, le Vénérable. C’est un lieu où vivent une femme, trois hommes et quatre enfants. Pourquoi, comment la vie les a-t-elle réunis là ? La réponse est en bas de ce billet. Enfin, il me semble…
Résumé comme ça, ce livre paraît simple. Et il l’est, oui. Il l’est, de la simplicité des jours qui se suivent, des moments que l’on partage, de la nature toujours proche, du respect que l’on se donne, entre autre cadeaux de la vie. Et ce texte est simple aussi du fait de cette riche simplicité que recèlent les deux mots que j’ai cités au début : douceur et tendresse. Elles sont en chacun des protagonistes de ce récit (même si les coups de gueule existent aussi, bien sûr), mais elles sont aussi, cette douceur et cette tendresse, derrière chacun des mots d’Hélène Dassavray.
En fait, c’est un texte tellement simple, tellement évident et, dans le même temps, tellement marquant, que je ne sais pas comment en parler. Je devrais juste dire : « Lisez-le, gardez à l’esprit sa douceur, puis partagez-la ». Et me taire ensuite.
Sébastien Fritch in Babelio
« Il disait que la maison tiendrait cinq cents ans, il avait construit vingt centimètres d’un seul mur en un mois. Ne serait-ce qu’une pièce à quatre murs, de deux mètres de haut, et sans parler de la toiture, le compte était vite fait. L’hiver allait arriver bien plus vite que ça. »
C’est l’histoire d’une femme, d’un campement dans le sud de la France, d’une famille, de trois pères et autant d’enfants, des amis qui vont et qui viennent au gré des saisons. Il y est question de sanglier, de fête, de voitures cassées et rafistolées et d’un « Vénérable » cerisier.
Au premier abord la vie communautaire de la tribu peut paraître atypique – trois familles recomposées en une avec la femme pour axe centrale n’est clairement pas un modèle répandu dans la société française des années 90.- Mais tout s’enchaîne si simplement qu’on y croit. On est emporté par le rythme et la douceur du propos. Des surnoms impossibles (Tronche-à-bisou, Gainsb, Le Viking…), des colères et des rires. On vit avec eux hors du temps, quand regarder un film était une fête, prendre une douche chaude, un luxe. Ça respire le bonheur sans mélancolie, la leçon de vie sans leçon ; c’est beau, c’est vrai.
On ressort de cette lecture rasséréné avec l’intuition d’avoir lu un livre essentiel. Si l’éditeur voulait ajouter un bandeau, je lui proposerais modestement: « Le livre anti crise ! »
Pierre Chavagné in Le hussard vert
Auprès d’un cerisier au tronc bleu, une femme a élu domicile dans une cabane, entourée de ses enfants et de leurs pères ; parce que les gens qui entrent dans mon cœur n’en ressortent jamais. Une vie sur pilotis qui grandit plus sûrement que la construction de cette maison qu’elle espère. Cette chimère que les enfants surnomment les ruines de la future maison, c’est aussi le défi d’une mère, d’une amante, plus déterminée à sauvegarder l’Amour, à veiller à ce qu’il se ramifie à ciel ouvert, qu’à l’ensevelir dans une existence conformiste. Dans ce récit drôle et tendre, on apprend ce qu’est la quête de chaque jour pour manger, boire, réclamer le R.M.I ou des aides à la Caisse d’allocations familiales, chercher entre les planches disjointes du plancher la monnaie qui manque pour le pain… Précarité, pauvreté, misère ne sont que des mots pour travailleurs sociaux. Rien de cela ne flotte sur la corde à linge autour de la future maison. C’est l’art de la débrouille qui prime et permet à la narratrice d’offrir aux siens une flambée d’amour quotidienne car elle semble plus apte à célébrer la vie sous toutes ses formes qu’à la domestiquer. On maraude aussi dans ce campement de fortune, des bonheurs à portée de mains, les nuits d’amour dans la caravane, le vin de l’amitié, les mots d’enfant. Les saisons et les fêtes se suivent au rythme des surprises de la nature… et des visiteurs au grand cœur qui approvisionnent le frigidaire et nourrissent les rêves des enfants autour de la grande tablée. Une belle liberté revendiquée et honorée par une femme qui n’est pas près de vieillir.
Paola Pigani in Le croquant (n°59-60)
Un livre ami, un qui parle à celui qui le tient comme s’il avait été écrit spécialement pour lui. Des larmes aussi, qui restent au bord, quand on se dit combien les gens peuvent être beaux, et qu’on en fait partie aussi malgré tout.
Bernard Alteyrac
Extrait
Descendre le chemin de terre te permettait de faire le point sur l’état de tes amortisseurs. Tu roulais entre une ligne de poteaux téléphoniques en lisière de la forêt de pins, et les rangées de vignes sur ta gauche. Trois cents mètres.
Tu ne pouvais pas manquer, au bord des vignes, ce que les enfants avaient appelé les ruines de la future maison. Il manquait beaucoup trop d’argent pour que le chantier avance ; les hommes étaient occupés aux vignes, à la débrouille et à la vie. Moi, aux enfances, aux amis, à la rêverie.
Tu débarquais en pleine nature, dans une clairière bordée de peupliers, de chênes et de ronciers. Au milieu de la clairière se dressait le Vénérable, un superbe cerisier dont le tronc se divisait en cinq branches, comme une étoile.
Sous le cerisier se nichait la cabane en bois, il avait suffi d’un printemps pour qu’elle se recouvre de vigne vierge. Le dernier poteau du téléphone servait de support à un des murs de planches de la maison, il semblait sortir du toit ; les soirs de fête, tu pouvais y voir flotter un drapeau de pirate.
Il fallait faire le tour de la cabane pour découvrir sa réelle physionomie – c’est là que tu changeais de planète. Elle était lovée en L autour du Vénérable, le bout des branches du cerisier se reposait dans les creux du toit ondulé. La cabane était bleue, tout comme le tronc du Vénérable (bouillie bordelaise : moitié cuivre, moitié chaux, fongicide naturel et décoratif), un bleu doux avec une pointe d’électricité, un bleu de ciel de Provence. Sauf les huisseries, peintes en rose tyrien et jaune soleil, les couleurs des temples bouddhistes – pour situer.
Le bleu des murs, relayé par celui de l’arbre, donnait à cet endroit une lumière particulière. Pour peu que l’on soit au temps du cerisier en fleurs, tu cherchais les fées ou les lutins. Tu tombais sur les enfants : une petite blonde au regard perçant qui s’était cachée à ton arrivée t’observait de loin, trois garçons te tiraient dessus.
Un des souvenirs que je garderai de l’enfance de mes fils c’est de m’être trouvée, dix fois par jour, dans l’œil de mire de toutes sortes d’armes. Où que j’aille, dans la maison ou au-dehors, je franchissais toujours quelque frontière et me retrouvais nez à nez avec un des garçons, armé ; d’un pistolet laser, d’un revolver en plastique, d’une vingt-deux de cow-boy ou d’un simple morceau de bois. Je me suis montrée coriace, ils n’ont jamais réussi à me descendre.
En réalité, comme tous ceux qui venaient là pour la première fois, depuis le haut du chemin c’était le tipi qui retenait ton attention. Un tipi douze perches, fait à la main, dans les règles de l’art. Les amateurs appréciaient.
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Éditions A plus d’un titre
Nombre de pages : 118
Format fermé 130 x 170 mm
ISBN : 978291748600
Prix 12,50 €
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